Au début de la vingtaine, je commençais à prendre beaucoup plus au sérieux mes études du français. À l’époque, c’était surtout dans l’idée de l’utiliser dans plusieurs pays comme langue véhiculaire. Plus tard, j’avais l’intention de continuer à m’en servir dans ma vie quotidienne. Étant donné que j’ai grandi aux États-Unis, je croyais qu’un déménagement au Québec serait idéal, surtout dans une ville comme Montréal.
Alors, je suis venu à Montréal en 2009. J’avais une amie de Saint-Bruno, sur la rive-sud de Montréal, qui fréquentait le groupe de conversation française à Minneapolis. Elle avait des problèmes dans sa vie personnelle et a décidé de rentrer au Québec vers le temps où j’y suis allé. C’est ainsi qu’elle est venue me chercher à l’aéroport. Je restais avec elle et sa colocataire (une de ses amies d’enfance) pendant deux semaines jusqu’à ce que j’aie trouvé du logement. Tout de suite, elle insistait pour qu’on se parle en anglais parce qu’elle ne voulait pas perdre ce qu’elle avait acquis aux États-Unis.
Cela m’a énervé énormément, mais je ne pouvais trop le montrer, car elle me dépannait lors de mon arrivée au Québec. Mon but principal, à part m’établir et trouver un emploi, c’était de parler français aussi souvent que possible, comme je faisais chez moi avec l’anglais. J’ai bientôt découvert que ce ne serait pas possible, non seulement à cause de ma formation aux États-Unis, mais aussi en raison de mon expérience professionnelle en tant que rédacteur en anglais—ce qui veut dire que, par défaut, mon anglais écrit sera toujours un peu plus fluide et sortira plus facilement que mon français. D’ailleurs, l’attirance mondiale de l’anglais est si forte. Tout le monde veut le parler parfaitement car c’est si merveilleusement international.
Je peux accepter que mon accent et mon français écrit ne soient jamais aussi bons que leur équivalent en anglais, mais cela ne m’empêche pas de vouloir parler en français aussi souvent que possible. Et puis, un bon matin, je serai capable de réfléchir et de concevoir mes pensées en français, ainsi que de rêver dans cette langue (à la manière qu’un non-anglophone prétend le faire après un long séjour aux États-Unis ou ailleurs dans la sphère anglophone). Inventer des idées et des concepts par le biais du français ouvrira les vannes dans mon esprit aux idées non harnachées que d’autres langues ne peuvent permettre. Je crois que chaque langue est porteuse d’une vision du monde qui permet certaines idées de se manifester. Il n’y a pas une langue commune porteuse de toute conception de l’esprit humain, peu importe sa polyvalence selon certaines personnes.
Tout cela était l’objet des frictions entre moi et mon amie. Elle m’a dit qu’elle aimait le Québec et que ses penchants au niveau de vote demeuraient du côté de la souveraineté – or, son état d’esprit bizarre face à l’anglais s’est maintenu. Ce n’était pas assez de le parler couramment. Si elle oubliait le moindre mot ou expression, l’horreur que cela lui faisait vivre lui faisait dire : « Tu vois ? Je perds mon anglais et j’ai travaillé si fort pour l’acquérir ! ».
D’accord, je peux comprendre son point de vue. Je me suis battu contre vents et marées pour tenter d’apprendre le français dans un petit village ouest-africain plurilingue, dans la France d’aujourd’hui, mondialisée et urbaine ou quand je vivais aux États-Unis. Mais je savais que c’est normal d’oublier certaines choses si l’on ne parle pas cette langue tous les jours ou si l’on vit dans un endroit où une autre langue s’utilise. Il ne faut qu’un effort supplémentaire afin de la maintenir. Pour ma part, j’allais à une rencontre de conversation française tous les samedis, j’écoutais des films francophones et je lisais des livres en français, tout en étudiant de nouveaux vocabulaires ici et là.
À part cela, ce qui restait de ma vie se faisait en anglais, principalement parce qu’on n’a pas le choix : chez les anglophones, ils ne parlent que l’anglais. En plus de cela, si l’environnement est anglophone, on s’attend rarement à ce que tout le monde parle une autre langue. On fait le contraire au Québec. Parler le français ne suffit pas. Quand l’occasion de parler l’anglais se présente, on s’y lance, même si l’autre personne désire pratiquer son français.
On a même déploré mon insistance à parler français en tout temps. On disait que c’était égoïste de ma part, qu’on a besoin de parler l’anglais au moins 50% du temps afin de s’enrichir l’un l’autre. On me dit cela chez les Québécois. Ne se rendent-ils pas compte qu’en dehors du Québec, personne ne leur dira – « Là là, tu dois me parler en français car c’est ton devoir de m’aider à pratiquer si tu t’attends au même traitement de ma part. » À l’extérieur du Québec, les gens vaquent à leurs occupations dans leur propre langue. Ainsi, si son but est d’améliorer notre anglais, c’est fort possible dans le contexte d’un pays anglophone.
Au Québec, du moins à Montréal, les gens ne font pas cela, au contraire. On m’a dit de quitter Montréal si je voulais seulement parler en français. D’abord et avant tout, si je faisais cela, c’est difficile de trouver un endroit au Québec où on s’exprime en français seulement. En Estrie, il y a une université anglophone et des tas des gens prêts à switcher la langue dès qu’ils entendent un accent. À Québec, même si c’est vrai qu’il y a des gens qui ne parlent pas anglais (et normalement ils disent cela comme si c’était la plus grande honte sur terre), c’est loin d’être seulement en français à Québec. En Outaouais, c’est très bilingue aussi. Il y a des anglophones en Gaspésie. Très franchement, c’est rare d’être « forcé » à utiliser la langue française.
Deuxièmement, la région montréalaise englobe la moitié de la population québécoise. Si la région métropolitaine se « bilinguise » (ce qui signifie angliciser), à quel effet doit-on s’attendre sur le reste du Québec ? En plus, pourquoi la plus grande ville de la nation doit-elle être bilingue au niveau institutionnel ? Être bilingue devrait demeurer un choix personnel et non une exigence afin de faire quoi que ce soit au Québec. Dans une ville comme Oslo, la grande majorité parle bien l’anglais, mais il n’y a pas un discours prédominant visant à rendre la ville bilingue institutionnellement.
Peut-être qu’on pourrait dire qu’il n’y a pas de communauté historique anglophone en Norvège, alors que c’est le cas à Montréal, et c’est pourquoi cette ville doit être bilingue. Que dirait-on de Sudbury ou de Moncton ? Ces villes n’avaient-elles pas aussi des minorités francophones ? Au niveau des affaires courantes (et non dans une statistique quelconque du gouvernement canadien), ces villes fonctionnent en anglais, en dépit de ces communautés. La capitale canadienne, Ottawa, est en réalité une ville anglophone avec quelques francophones bilingues éparpillés ici et là. Parler français dans les rue et dans les magasins, et on vous dira d’aller au Québec pour cette langue !
Mais revenons à Montréal. J’étais frappé de voir à quel point le centre-ville est anglicisé. C’est sûrement dû aux deux universités anglophones situées en plein centre-ville ainsi qu’à la population de l’Ouest-de-l’Île (je n’étais pas au courant que celle-ci n’était pas bilingue, mais remplie d’anglophones unilingues). Je suis allé à la piscine du YMCA sur Peel et Maisonneuve et seulement les services de base étaient en français. Essayer de parler de quelque chose d’un peu plus compliquer que « bonjour » et « merci » (tel qu’avoir la bonne adresse sur son permis de conduire ou obtenir les heures de fermeture de la piscine) et ils répondent neuf fois sur dix en anglais. Demander qu’on vous répondre en français et il se peut qu’ils refusent, dépendamment de leur humeur. Une fois, il y avait un immigrant d’Haïti ou d’Afrique francophone qui refusait de me parler en français, et s’est montré très bête face à mon insistance. Il était probablement entiché de l’anglais et s’est dit qu’il parlerait seulement cette langue, comme j’avais beaucoup remarqué à Montréal. Mais il ne l’avouera jamais. Finalement, on a trouvé une dame québécoise d’âge mûr (la seule qui travaillait là-bas) pour me dire de m’en aller, mais au moins, elle l’a fait en français.
Imaginez maintenant que quelqu’un demandait qu’on lui réponde en français, avec le même accent que le mien. Croyez-vous qu’on le ferait ? Je ne sais pas lesquels sont les plus difficiles là-dessus, les anglophones de vieille souche ou les immigrants de deuxième et de troisième génération qui, malgré la loi 101, persistent dans leur habitude de me parler en anglais, même si leur français est meilleur.
Qui aurait cru que l’environnement linguistique pourrait être si compliqué ? Pourquoi les anglophones et les allophones ne s’intéressent-ils pas davantage au Québec et à sa langue ? Pourquoi sont-ils si fermés sur eux-mêmes ?
Plus important encore : pourquoi les francophones, surtout ceux à Montréal, ne sont-ils pas à l’aise avec leur langue de la même manière que leurs concitoyens anglophones ? Je suis pas mal sûr de savoir pourquoi, et vous ?
Alors, je suis venu à Montréal en 2009. J’avais une amie de Saint-Bruno, sur la rive-sud de Montréal, qui fréquentait le groupe de conversation française à Minneapolis. Elle avait des problèmes dans sa vie personnelle et a décidé de rentrer au Québec vers le temps où j’y suis allé. C’est ainsi qu’elle est venue me chercher à l’aéroport. Je restais avec elle et sa colocataire (une de ses amies d’enfance) pendant deux semaines jusqu’à ce que j’aie trouvé du logement. Tout de suite, elle insistait pour qu’on se parle en anglais parce qu’elle ne voulait pas perdre ce qu’elle avait acquis aux États-Unis.
Cela m’a énervé énormément, mais je ne pouvais trop le montrer, car elle me dépannait lors de mon arrivée au Québec. Mon but principal, à part m’établir et trouver un emploi, c’était de parler français aussi souvent que possible, comme je faisais chez moi avec l’anglais. J’ai bientôt découvert que ce ne serait pas possible, non seulement à cause de ma formation aux États-Unis, mais aussi en raison de mon expérience professionnelle en tant que rédacteur en anglais—ce qui veut dire que, par défaut, mon anglais écrit sera toujours un peu plus fluide et sortira plus facilement que mon français. D’ailleurs, l’attirance mondiale de l’anglais est si forte. Tout le monde veut le parler parfaitement car c’est si merveilleusement international.
Je peux accepter que mon accent et mon français écrit ne soient jamais aussi bons que leur équivalent en anglais, mais cela ne m’empêche pas de vouloir parler en français aussi souvent que possible. Et puis, un bon matin, je serai capable de réfléchir et de concevoir mes pensées en français, ainsi que de rêver dans cette langue (à la manière qu’un non-anglophone prétend le faire après un long séjour aux États-Unis ou ailleurs dans la sphère anglophone). Inventer des idées et des concepts par le biais du français ouvrira les vannes dans mon esprit aux idées non harnachées que d’autres langues ne peuvent permettre. Je crois que chaque langue est porteuse d’une vision du monde qui permet certaines idées de se manifester. Il n’y a pas une langue commune porteuse de toute conception de l’esprit humain, peu importe sa polyvalence selon certaines personnes.
Tout cela était l’objet des frictions entre moi et mon amie. Elle m’a dit qu’elle aimait le Québec et que ses penchants au niveau de vote demeuraient du côté de la souveraineté – or, son état d’esprit bizarre face à l’anglais s’est maintenu. Ce n’était pas assez de le parler couramment. Si elle oubliait le moindre mot ou expression, l’horreur que cela lui faisait vivre lui faisait dire : « Tu vois ? Je perds mon anglais et j’ai travaillé si fort pour l’acquérir ! ».
D’accord, je peux comprendre son point de vue. Je me suis battu contre vents et marées pour tenter d’apprendre le français dans un petit village ouest-africain plurilingue, dans la France d’aujourd’hui, mondialisée et urbaine ou quand je vivais aux États-Unis. Mais je savais que c’est normal d’oublier certaines choses si l’on ne parle pas cette langue tous les jours ou si l’on vit dans un endroit où une autre langue s’utilise. Il ne faut qu’un effort supplémentaire afin de la maintenir. Pour ma part, j’allais à une rencontre de conversation française tous les samedis, j’écoutais des films francophones et je lisais des livres en français, tout en étudiant de nouveaux vocabulaires ici et là.
À part cela, ce qui restait de ma vie se faisait en anglais, principalement parce qu’on n’a pas le choix : chez les anglophones, ils ne parlent que l’anglais. En plus de cela, si l’environnement est anglophone, on s’attend rarement à ce que tout le monde parle une autre langue. On fait le contraire au Québec. Parler le français ne suffit pas. Quand l’occasion de parler l’anglais se présente, on s’y lance, même si l’autre personne désire pratiquer son français.
On a même déploré mon insistance à parler français en tout temps. On disait que c’était égoïste de ma part, qu’on a besoin de parler l’anglais au moins 50% du temps afin de s’enrichir l’un l’autre. On me dit cela chez les Québécois. Ne se rendent-ils pas compte qu’en dehors du Québec, personne ne leur dira – « Là là, tu dois me parler en français car c’est ton devoir de m’aider à pratiquer si tu t’attends au même traitement de ma part. » À l’extérieur du Québec, les gens vaquent à leurs occupations dans leur propre langue. Ainsi, si son but est d’améliorer notre anglais, c’est fort possible dans le contexte d’un pays anglophone.
Au Québec, du moins à Montréal, les gens ne font pas cela, au contraire. On m’a dit de quitter Montréal si je voulais seulement parler en français. D’abord et avant tout, si je faisais cela, c’est difficile de trouver un endroit au Québec où on s’exprime en français seulement. En Estrie, il y a une université anglophone et des tas des gens prêts à switcher la langue dès qu’ils entendent un accent. À Québec, même si c’est vrai qu’il y a des gens qui ne parlent pas anglais (et normalement ils disent cela comme si c’était la plus grande honte sur terre), c’est loin d’être seulement en français à Québec. En Outaouais, c’est très bilingue aussi. Il y a des anglophones en Gaspésie. Très franchement, c’est rare d’être « forcé » à utiliser la langue française.
Deuxièmement, la région montréalaise englobe la moitié de la population québécoise. Si la région métropolitaine se « bilinguise » (ce qui signifie angliciser), à quel effet doit-on s’attendre sur le reste du Québec ? En plus, pourquoi la plus grande ville de la nation doit-elle être bilingue au niveau institutionnel ? Être bilingue devrait demeurer un choix personnel et non une exigence afin de faire quoi que ce soit au Québec. Dans une ville comme Oslo, la grande majorité parle bien l’anglais, mais il n’y a pas un discours prédominant visant à rendre la ville bilingue institutionnellement.
Peut-être qu’on pourrait dire qu’il n’y a pas de communauté historique anglophone en Norvège, alors que c’est le cas à Montréal, et c’est pourquoi cette ville doit être bilingue. Que dirait-on de Sudbury ou de Moncton ? Ces villes n’avaient-elles pas aussi des minorités francophones ? Au niveau des affaires courantes (et non dans une statistique quelconque du gouvernement canadien), ces villes fonctionnent en anglais, en dépit de ces communautés. La capitale canadienne, Ottawa, est en réalité une ville anglophone avec quelques francophones bilingues éparpillés ici et là. Parler français dans les rue et dans les magasins, et on vous dira d’aller au Québec pour cette langue !
Mais revenons à Montréal. J’étais frappé de voir à quel point le centre-ville est anglicisé. C’est sûrement dû aux deux universités anglophones situées en plein centre-ville ainsi qu’à la population de l’Ouest-de-l’Île (je n’étais pas au courant que celle-ci n’était pas bilingue, mais remplie d’anglophones unilingues). Je suis allé à la piscine du YMCA sur Peel et Maisonneuve et seulement les services de base étaient en français. Essayer de parler de quelque chose d’un peu plus compliquer que « bonjour » et « merci » (tel qu’avoir la bonne adresse sur son permis de conduire ou obtenir les heures de fermeture de la piscine) et ils répondent neuf fois sur dix en anglais. Demander qu’on vous répondre en français et il se peut qu’ils refusent, dépendamment de leur humeur. Une fois, il y avait un immigrant d’Haïti ou d’Afrique francophone qui refusait de me parler en français, et s’est montré très bête face à mon insistance. Il était probablement entiché de l’anglais et s’est dit qu’il parlerait seulement cette langue, comme j’avais beaucoup remarqué à Montréal. Mais il ne l’avouera jamais. Finalement, on a trouvé une dame québécoise d’âge mûr (la seule qui travaillait là-bas) pour me dire de m’en aller, mais au moins, elle l’a fait en français.
Imaginez maintenant que quelqu’un demandait qu’on lui réponde en français, avec le même accent que le mien. Croyez-vous qu’on le ferait ? Je ne sais pas lesquels sont les plus difficiles là-dessus, les anglophones de vieille souche ou les immigrants de deuxième et de troisième génération qui, malgré la loi 101, persistent dans leur habitude de me parler en anglais, même si leur français est meilleur.
Qui aurait cru que l’environnement linguistique pourrait être si compliqué ? Pourquoi les anglophones et les allophones ne s’intéressent-ils pas davantage au Québec et à sa langue ? Pourquoi sont-ils si fermés sur eux-mêmes ?
Plus important encore : pourquoi les francophones, surtout ceux à Montréal, ne sont-ils pas à l’aise avec leur langue de la même manière que leurs concitoyens anglophones ? Je suis pas mal sûr de savoir pourquoi, et vous ?
Intéressant tes articles! Mais si tu veux parler français au travail et veux vivre l'expérience "Montréal" à fond, cherche dans le coin du Plateau Mont-Royal ou Rosemont. Les deux quartiers sont francos, mais avec une grande proportion de personnes bilingues. Je viens de la région (Victo) et j'ai toujours trouvé que ces deux quartiers étaient au diapason et au centre de la vie culturelle de la ville. Les gens y sont fiers d'être francos, mais sont capables de lire le Vice et de répondre en anglais au téléphone.
RépondreEffacerVille Saint-Laurent et le West Island, c'est la banlieue... C'est comme dire qu'on travaille à New York quand en vérité on demeure dans le Jersey! :)
Partie 1. Je lisais un livre de Chantal Bouchard dernièrement, une linguiste reconnue de McGill, sur la « légitimité linguistique » du français au Québec. (Ça t’intéresserait sûrement, ça traite de l'origine du français québécois ; le titre est « Méchante Langue ») Elle y citait un sociologue français dont le nom m'échappe (non ce n'était pas Bourdieu) qui soulignait que l'attirance d'une langue s'explique par le fait qu'une langue « ...est aussi grande que le peuple qui la parle...». Bien entendu, la « grandeur » du peuple est ici une appréciation subjective ; un peuple n'est pas « grand » dans l'absolu, mais dans la perception que les autres en ont, ce qui suscitera soit admiration, intérêt, attirance etc. Bien sûr, un individu peut décider d'apprendre une langue quelconque pour diverses raisons personnelles : pour s'enrichir, découvrir une culture, par simple curiosité ou par goût, etc. Mais quand on observe un mouvement de masse vers UNE langue en particulier, on commence à parler de phénomène sociologique et c'est précisément ce que tu pointes ici. C'est dire que le mouvement vers une langue n'est plus le fruit d'un simple choix individuel, mais d'un phénomène d'entrainement (ou de rejet) collectif. Si donc la force d'attirance d'une langue s'explique par la perception favorable que les gens ont de sa culture ou de ce qui l'entoure, le refus d'une autre langue ou son rejet, s'explique par l'inverse, soit la perception négative que les gens ont de sa culture, de son peuple, ou au mieux, d'une absence d'intérêt à son égard. En somme, voir que des immigrants écarte le français du revers de main et que de nombreux francophones se font une honte de ne pas bien parler anglais, qu'est ce que cela laisse penser de la perception qu'ont les québécois de leur propre culture? Ces francophones ont t-il à ce point honte de ne pas parler anglais, ou ont t-il plutôt honte de ne parler que le français québécois? Je ne suis pas de ceux qui croient que nous sommes tous des petites bulles fermés les unes aux autres, imperméable aux influences de notre époque ou à celles du passé, la théorie du «self-made-man», très peu pour moi. L'éducation que l'on reçoit et la société dans laquelle nous grandissons ont une incidence considérable sur notre perception à la fois du monde qui nous entoure et de nous même ; nous ne pouvons pas nous en soustraire, du moins pas sans de réels efforts. Certaines idées, valeurs, attitudes ou perceptions etc. se répètent donc et se perpétuent par enseignement ou mimétisme d'une génération à une autre sans pour autant que la nouvelle génération n'ai vécu l'événement justifiant telle ou telle idée, etc. Autrement dit, je ne suis pas obligé d'avoir vécu le colonialisme, pour pouvoir raisonner en colonisé, si on ma élevé ainsi... À chaque fois où je vois un de ces francophone se pavaner fièrement en parlant anglais (j'en connais même qui vont jusqu'à se dire « anglophones »...), je ne peux faire autrement que de voir un chef de tribu d'Afrique noire du 19ème siècle se pavoiser de son chapeau haute-forme en peau de castor et de sa chemise d'officier britannique... Attiré par ce qu'il croit être de la « grandeur», croyant trouver dans son travestissement un prestige qu'il n'arrive plus à voir dans sa propre identité, dans sa propre culture, tant il s'est fait répéter par le conquérant qu'elle était inférieure... « If you can't beat them, join them » qu'ils disent... (suite)
RépondreEffacerPartie 2. Quand on souligne ce phénomène sociologique en parlant de l'Afrique, des amérindiens ou de quiconque d'autre, on parle d'horrible colonialisme, mais quand on l'applique aux québécois, on parle de « l'évolution », de « on est rendus en 2015 », de « revenez-en des vieilles chicanes de langues », de « c'est la langue de l'avenir » pis de « coudonc, qu'est ce que t'as contre les anglais, es-tu raciste? ». Bref, on est souvent plus prompt à reconnaître chez les autres ce qui existe pourtant parmi nous... Bien sûr la situation historique du Québec n'est pas la copie conforme du colonialisme Britannique en Afrique ou ailleurs, mais on ne peu éviter de reconnaître de troublant parallèles entre les processus psychologiques de différents peuples (n’ayons pas peur d'appeler un chat un chat ici...) conquis. Bref, je pense que si tu veux comprendre la relation que les québécois entretiennent avec leur langue, tu dois te plonger dans l'Histoire et tenter de comprendre la perception que les québécois ont d'eux même au fil du temps, ainsi que l'origine de cette perception, de cette interprétation de l'identité québécoise, ses mythes fondateurs, etc. Le but n'est pas de trouver un coupable, mais bien de comprendre l'origine de ce malaise identitaire, parce que c'est de ça dont il est question ici ; Au delà d'une question de langue, c'est une question d'identité culturelle, d'appréciation et d'estime de soi. Tu remarquera aussi que même parmi les québécois disons « francophiles », plusieurs ont un profond mépris pour la façon « québécoise » de parler français et perçoivent souvent le québécois comme un « faux-français », méprise ses archaïsmes ou sa prononciation et considèrent la culture québécoise comme étant pauvre et inférieure à la culture française... c'est une autre sorte de colonisé... (ce qui est drôle, ou triste, c'est qu'en gros, ils répètent un peu ce que disait le rapport Durham, qu'ils méprisent pour la plupart ; «...un peuple sans histoire et sans culture ») Au Québec c'est comme ça depuis des siècles (depuis la conquête en fait...) : une partie regarde le monde anglo-saxon avec admiration et envie, une autre n'a d'yeux que pour la France, ses intellectuels et ses arts, mais bien peu de québécois s'apprécient réellement pour qui ils sont et en sont fiers... hélas. On a le cul entre deux chaise depuis 250 ans et on semble refuser de s’asseoir sur notre propre derrière à nous... Bref, c'est beaucoup plus qu'une simple question linguistique, la langue n'est en fait que la pointe visible de l'iceberg... cette attitude que tu observe chez certains québécois se perpétue depuis plusieurs générations, et c'est historiquement observable. C'est à penser que depuis que les britanniques nous ont dit que nous n'étions plus français, certains ont voulu leur prouver le contraire, tandis que d'autres les ont cru... plutôt que d'accepter d'être ce que l'on appelait à l'époque « canadien » et que l'on nomme aujourd'hui « québécois »... Cette division, ce malaise, se perpétue encore, il se manifeste différemment, mais il perdure tout de même, et tu en es témoin aujourd'hui...
EffacerEn passant, merci encore pour tes textes ; tes observations sont justes, pertinentes et rafraîchissantes ! Merci beaucoup !
En passant, désolé pour les fautes et la longueur du texte, ça s'est mis à sortir tout seul comme ça...
EffacerIl y a énormément de fautes graves de français et de syntaxe dans votre article mais c'est un bon effort! Continuez à apprendre la langue de Molière! Surtout ne vous découragez pas, plus vite que vous ne le pensez vous aurez un bon niveau!
RépondreEffacerPS: je suis français de France et merci d'apprendre notre belle langue!
Salut! Je suis super content que tu veuilles t'améliorer bientôt tu seras super bon!
EffacerDonc on va commencer avec la phrase que tu viens d'écrire. ''qui fais semblant être des États-Unis''
correction: ''qui faiT semblant D'être des États-Unis''. Je sais que le français est une langue compliquée mais un petit truc, 3e personne du singulier toujours un T, jamais un S à la fin de ton verbe. Aussi tu as oublié le ''d'' avant être, une grosse faute mais tout à fait excusable pour quelqu'un qui apprend la langue!
''pour faire mieux passer mes observations'' ici c'est plus une question de syntaxe. Tu devrais plutôt dire: pour mieux faire passer mes observations.
N'hésite pas si tu veux que je corrige tes fautes! Je peux aussi corriger tes prochains textes dans ton blogue.
PS: C'est vraiment drôle que des gens pensent que tu es francophone! En tout cas ce sont des anglos qui disent ça je suppose?... Faut pas bien connaître le français pour te prendre pour un francophone!
Au plaisir!
Bonjour Thomas, l'Américain.
RépondreEffacerTu n'es pas comme Thomas, l'imposteur de Jean Cocteau. Tu es un vrai Américain qui parle français langue seconde comme moi !
D'abord j'ai trouvé une malaise des Canadiens et Québécois anglicisés devant le Québec et le français bien avant mon arrivée au Québec. Ma tante préférée m'a dit qu'elle ne viendrait jamais au Québec pour me voir. Elle a tenu parole. Pourtant avec son amie, enseignante de français, elles visitaient Paris quasiment aux 2 ans pendant 40 ans à partir de 1960...
En apprenant le français en Ontario, j'ai fait le constat qu'un grand part des élèves dans les classes de mes filles dans une école francophone parlaient l'anglais à la maison. J'ai lu de « l'Asphyxiation de français à Sudbury » dans la revue McLean's avant d'arriver en ville pour étudier à l'Université Laurentienne qui offre des programmes en français (mais si peu). J'ai pu vérifier sur place. Dans une ville où 30 % parlait en français à la maison, j'entendait rarement le français en public. Pour palier au manque de français ailleurs j'ai commencé à parler en français avec mes enfants. Pendant des années mes filles m'ont répondu en anglais.
Dix ans plus tard je suis arrivé à Montréal. Ici je peux m'exprimer en français. Pourtant pour exercer ce droit je me bat - il me faut battre - chaque jour vivre en français à Montréal. Partout et de plus en plus j'entends l'anglais comme si c'est normal d'adresser tout le monde en anglais dans une ville francophone...
Les immigrants qui viennent ici ayant appris le français comme 2e (ou 3e) langue trouvent partout l'exigence d'une compétence en anglais pour travailler avec leur colleagues qui eux aussi étaient formés pour travailler en anglais. Puis il y a ceux qui se demandent pourquoi la majorité des transferts linguistique à Montréal sont vers l'anglais, langue maternelle de seulement un quart de la population.
Merci pour la pose des questions d'une brûlante actualité.